Cultiver nos talents comme on cultive des bégonias
Nos zones de génie au service de notre singularité et de notre épanouissement
Je suis arrivée il y a quelques jours en Bretagne. A Plouhac très exactement.
Une commune entre mer et campagne. Une vieille bâtisse en pierres, où les bégonias sont maîtres.
Maguerite, la doyenne et propriétaire, bichonne ses invités d’un été. Elle est d’un autre temps, celui où on cultivait la terre, celui où les traditions étaient spontanées. Non travaillées. On ne s’y accrochait pas comme aujourd’hui. Elles se collaient alors à nous, c’est tout.
Hier au café, sur sa terrasse entourée de fleurs toutes plus improbables les unes des autres, ses poneys d’attelage au lointain, elle parle de son quotidien. Sans épanchements.
Avec une finesse et une intelligence que je savoure.
Elle laisse entrevoir à la fin de quelques phrases un regret, celui de ne pas avoir voyagé. De ne connaître que ce pays qui l’a vu grandir, vieillir et bientôt mourir. Ça dure deux secondes bien sûr. Pas un tempérament à regretter trop longtemps.
Je lui envie ce cadre de vie moi. Cette ferme un peu paumée, les falaises en contre bas, cette nature indomptable.
Elle parle d’un « temps que les moins de 20 ans ne peuvent pas connaitre ». Et pourtant, en l’écoutant je la trouve très moderne.
Elle questionne le rapport à notre vie, à celle que l’on choisit et celle que l’on poursuit par habitude, par tradition sans trop se poser de question.
« J’ai toujours été en action. Je remplis le temps en travaillant », me confesse-t-elle. Elle est pieuse Marguerite.
Effectivement à 80 ans passés, veuve, on la croise en train de poncer une table, nourrir ses poules, recevoir ses petits-enfants, aménager son gite, nous amener des pommes de terre de son fils agriculteur juste à côté.
Lors d’un de ses passages, elle s’arrête à mes côtés et me demande ce que je fais. Elle tient un seau d’épluchures, son chien “Joli” à ses pieds.
Je lève les yeux et j’observe ce bout de femme. Un corps courbé mais tonique, des sabots en plastiques, une paire de lunettes dorée. Seule artifice de sa tenue. Un jean un peu trop grand, un haut bleu ciel brodé qui met en lumière ses yeux gris, joyeux et vifs.
Je l’invite à prendre un café. Elle hésite, s’autorise une pause après un bref regard en arrière. S’assoit. Je lui montre mes croquis. Elle m’interroge. Je lui parle de mon projet : mon roman. Pourquoi ? Peut-être car cette femme me fait penser à ce qu’aurait pu devenir mon héroïne.
Elle écoute discrètement avant de me dire : « Vous êtes une artiste ».
Je lui réponds : « Non, je ne crois pas. Enfin si peut-être » (toujours difficile pour moi d’assumer cette part de mon Adn. J’ai servi des artistes une partie de ma carrière. Me considérer comme tel me parait une imposture.)
Elle ajoute : “Je n’ai pas de talent. Je ne sais pas dessiner”.
Se poursuit un échange fort intéressant entre une vieille dame et une quarantenaire en transition sur ce qu’est le talent ou ce que je préfère encore appeler nos zones de génie.
Au programme :
Ce qu’est une zone de génie, ou talent et pourquoi elle peut transformer notre rapport au travail, à nous-mêmes et au monde,
Le rôle central de la créativité dans son expression,
Et comment l’état de flow (concentration, état de bien être, …) peut aider à reconnecter à ce qui nous rend vivant, vraiment.
(Tout proche de la maison de Marguerite)
Est-ce que ce que je fais me nourrit profondément ?
J’ai découvert ce terme de talents ou de zones de génie à une période sombre de ma transition. Le moment où je n’avais envie de rien et où j’étais incapable d’identifier mes besoins. Cela a été une révélation pour moi mais aussi pour ma manière d’être et de voir les autres.
C’est à cette époque, que j’ai dû me remettre en « mouvement. » Tenter de renouer avec ce qui me faisait vibrer. Aller chercher mes zones de génie pour retrouver plaisir, confiance en moi, renouer avec le bonheur de se sentir vivante et me remettre en lien avec les autres.
(Je vous invite à lire ma newsletter sur la question des envies. Elle pourrait vous éclairer sur ce sujet : Plus d’info : ici)
Les zones de génie ou talent : c’est notre espace naturel d’expression, là où on agit avec joie, fluidité et sens, sans forcer.
Et qui bénéficie aussi aux autres.
Je préfère zone de génie à talent. Le talent évince, par croyance, une grande partie de ceux qui pense ne pas en avoir. Alors que nous en sommes tous pourvus.
La différence c’est que nous n’avons pas ou pas tous eu l’occasion de les cultiver, de les identifier et de les valoriser.
Si vous remontez dans le temps lorsque vous étiez enfant, où si vous observez vos propres enfants, vous pouvez constater que vous avez , ou qu’eux ont, des dispositions innées sur certains sujets, pratiques. Des éléments que vous admirez chez eux, ou que l’on a admiré chez vous.
A un moment, la bascule s’opère.
Ces zones de génie se masquent au profit de compétences. Notre système les valorise plus aisément. La différence entre les deux : les compétences s’acquièrent, les talents sont innés. Les talents rendent heureux, les compétences pas forcément.
Le risque selon moi de ne pas les connaître ou les cultiver, c’est perdre à un moment ce qui nourrit notre richesse. Oublier ce qui nous distingue, ce qui fait notre singularité.
Explorer sa zone de génie devient un levier pour être plus épanoui
Pour sortir du mode “pilotage automatique”
Beaucoup de transitions naissent d’un malaise diffus : on est compétent, à l’aise mais on ne vibre plus. Identifier ta zone de génie, c’est reprendre le volant de sa trajectoire.
Pour cultiver sa singularité
On n’a pas besoin de rentrer dans une case. Notre zone de génie, c’est notre empreinte. La reconnaître, c’est s’autoriser à l’exprimer.
Pour puiser la motivation en soi
La motivation durable ne vient pas des récompenses externes, mais de l’intérieur. Notre zone de génie est un réservoir de motivation intrinsèque : elle nous connecte au plaisir d’agir, à la créativité, au flow.
Depuis ce travail introspectif, j’ai renoué avec beaucoup de choses qui faisaient ma singularité. Bien entendu, j’ai renoué avec l’écriture, la danse et je me suis initiée au dessin.
Mais j’ai aussi pris conscience de ce qui me rendait heureuse : transmettre. partager, inspirer, découvrir.
Cette diversité est devenue une richesse que je préserve et sur laquelle je m’appuie pour guider mes choix.
Comment identifier ses zones de génie ou ses talents ?
Pour ma part, j’ai commencé par répondre à ces quelques questions :
Qu’est-ce que je fais avec facilité, que les autres trouvent difficile ? (j’ai ainsi identifié mon talent pour fédérer)
Quelles activités m’absorbent au point d’en oublier le temps ? (pour moi, la danse, écrire, dessiner, partager un puzzle, jeu avec mes enfants….)
Qu’est-ce que les autres me demandent toujours spontanément ? (Dans ma famille, on me demande toujours de lire des histoires, je le fais avec un plaisir manifeste, le temps passe vite. Derrière cette activité, se cache mon talent de transmission)
Dans quelles situations, je me suis déjà sentie frustrée au point de vouloir agir à ma manière ? ( le nombre de fois où cela m’est arrivé au travail !!!)
Souvent, derrière une frustration, un sentiment d’ennui ou d’incompréhension, se cache un talent non exprimé.
Un petit exercice sur route de Marguerite?
Prenez quelques minutes pour noter 3 moments où vous vous êtes senti pleinement vous, dans un état d’aisance, de plaisir, et de clarté. Cherche le fil rouge entre ces moments : un geste, une posture, une façon d’interagir, une énergie particulière ?
Conclusion
Marguerite est repartie.
Elle a oublié le seau à mes pieds. “Joli” parcourt les allées de bégonias.
Je reste avec ses mots en héritage. “ Cultiver votre talent, comme j’ai cultivé ma terre. Dans le fond, on fait un peu pareil. On cultive vous et moi.”
Vous avez aimé cette newsletter ? Commentez la, partager la. Si vous m’avez lu jusqu’au bout, vous avez compris mon besoin de transmettre, de partager.
Il y a beaucoup de Marguerite en nous tous. Merci pour votre soutien.
Merci pour cette lettre et ce partage d'expériences touchant.
Tu me laisse avec plein de questions et d'exercices pour plus tard. Je ne me connais moi même que très peu et commence à peine mon travail d'introspection. Merci beaucoup pour ces questions qui me guideront.
Sur ceux je m'en vais découvrir d'autres de tes post :)
Ta lettre me parle beaucoup et résonne avec mon mois de juin oú j’ai exploré et encouragé mes zones de génie :)
La créativité est source de bonheur 🙃